Nous le savons tous et nous l’avons entendu des centaines de fois. Nos parents nous l’ont souvent dit. Pour « faire les choses dans le sens du monde » on doit se concentrer sur une seule et unique tâche à la fois. C’est en quelque sorte l’antithèse du multitâche. Malgré les bons conseils, on se laisse encore mettre en échec par ce fantasme de productivité que devrait nous donner le « multitasking ». Le mythe a maintenant assez duré. C’est l’heure de voir qui se cache sous le père Nöel.

La mobilité extrême de l’attention

Nous mangeons devant la télé avec notre laptop et notre cellulaire sur les genoux. On navigue sur Facebook et sur YouTube en consultant ses courriels, le tout pendant que nous organisons notre prochaine soirée par SMS. Pourtant, nous devrions nous concentrer à faire une seule tâche. Soit écrire, soit lire ou soit planifier. Il y a une chose qui est certaine – nous sommes tous conscients que faire plusieurs choses à la fois nous rend moins efficaces et plus stressés. Plus le rythme accélère, et pire c'est.

Devant cette évidence, pourquoi est-ce si difficile de focuser (1) sur une seule et unique tâche à la fois? La réponse est très simple. Parce que cela nous fait sentir bien et accompli. Les gens qui « multitâchent » (2) ne sont pas plus productifs, ils ont seulement ce sentiment gratifiant d’être satisfait de leur travail. Il semble que leur journée eu été « bien remplie ».

Cette scène produit un effet « WOW ! » qui donne l’impression que cette personne est vraiment en affaires. On se dit : « Moi aussi je veux assurer le show comme ça. »

Dans le but de comprendre ce qui se passe dans notre cerveau et d’analyser si cela a du sens, j’ai trouvé certaines recherches plus qu’intéressantes avec des réponses à cette question.

La chercheuse Zheng Joyce Wang mentionne dans sa recherche que si nous étudions des notes de cours, que nous écoutons la télé et que nous textons nos amis à travers tout ça, nous nous sentons plus satisfaits de notre travail. Nous accomplissons toutes ces tâches en même temps, et on se sent particulièrement efficient. Malheureusement, c’est exactement l’opposé qui se produit. Les étudiants qui étudient de façon multitâche se sentent bien sur le moment, mais leurs résultats sont beaucoup moins bons que ceux qui ne « multitâchent » pas.

L’aspect fashion du multitâche

Une autre cause qui nous pousse à multitâcher est le fait que ceux qui le font, semblent très efficaces vu de l’extérieur. Nous voulons à notre tour, devenir efficaces comme ces gens. Ce fait a été démontré dans cette étude du New Atlantis.

Quand je vois quelqu’un écrire un courriel, pendant qu’il est en train de faire une approbation par téléphone, tout en faisant un signe à la serveuse qu'il désire un réchaud de café, je me dis : « Wow ... lui yé en business ». Puis on se dit : « Moi aussi je veux assurer le show comme ça ».

C’est de façon inconsciente nous nous mettons cette pression de jongler avec de plus en plus de tâches en même temps. Voici d’où vient notre fameux : « Ouff, j’ai eu une grosse journée à job! » Pour nous, l’acteur de notre propre vie, c'est intense et demandant. Ça nous semble réellement productif. Pourtant, la docteure Wang en conclut que notre productivité journalière ne fait que descendre proportionnellement.

En 2005, une étude conduite par le Institute of Psychiatry at the University of London, conclut que les employés distraits par les courriels et les conversations cellulaires, voient leur QI tomber de moitié par rapport à celui trouvé sur ceux qui consomment de la marijuana. Une autre étude de l'University of California at Irvine a démontré qu’il prend en moyenne 25 minutes pour rétablir notre attention sur la tâche qui était en cours.

Que se passe-t-il dans notre cerveau lorsque nous sommes en mode multitâche? Un point particulièrement intéressant est que notre cerveau est incapable de travailler de façon multitâche (de manière parallèle).

Je répète. Notre cerveau n’est pas capable de travailler de façon multitâche. Par exemple… Si nous sommes en train de manger, que nous avons quatre fenêtres de chat en cours de conversation, en plus d’écrire un article, ce n’est pas parce que notre cerveau à la capacité de focuser sur toutes ces activités à la fois.

Ce qui se produit à la place, c’est que le multitâche divise notre cerveau. Cela crée quelque chose que les chercheurs appellent l’effet « spotlights », c’est-à-dire que notre cerveau met en lumière une chose à la fois.

Le cerveau dirige notre attention sur l’activité de manger, puis ensuite, l’activité d’écrire, puis ensuite sur l’activité de suivre une conversation, etc., etc., etc… Notre attention ne fonctionne pas en parallèle, mais bien en série. Nous interrompons le flux de pensée de l’activité X en cours pour Y. Nous interrompons le flux de pensée de l’activité Y en cours pour Z. Un beau trou sans fin.

Voici où se trouve le bobo qui fait mal à la fin de la journée. Les interruptions, les coupures d'attention que nous nous infligeons nous font mal. Pour les amateurs de BDSM nous pourrions comprendre, mais aux dernières nouvelles la majorité d’entre nous n’est pas masochiste.

Pour les amateurs de BDSM nous pourrions comprendre, mais aux dernières nouvelles la majorité d’entre nous n’est pas masochiste.

Clifford Nass, chercheur à l’université de Stanford a pris comme hypothèse durant son étude, que ceux qui « multitâchent » beaucoup ont certainement développé des habiletés exceptionnelles pour :

  1. Filtrer l’information
  2. Changer rapidement leurs focus entre différentes tâches
  3. Conserver en mémoire leur travail

Il a trouvé que tous ces points sont faux. « Nous étions réellement sous le choc. Nous avons tous perdu nos paris. En fait, nous avons constaté que ceux qui « multitâchent » sont terriblement mauvais dans tous les aspects du multitâche. Les gens qui « multitâchent » beaucoup sont en fait bien pires à filtrer les informations non pertinentes et performent moins bien lorsqu’il est question de passer d’une tâche à l’autre, comparativement à ceux qui travaillent généralement sur une tâche à la fois. » La majorité des études sur le sujet reconnaissent ce fait.

Personnellement, j’ai eu le même genre de résultats n’ayant jamais lu ce genre d’études auparavant. J’ai mis en place quelques règles personnelles pour bannir le multitâche de ma façon de travailler une fois pour toutes. Cela me permets de spécifiquement focuser sur une tâche à la fois. Les résultats que j’ai obtenus sont incroyables et je veux les partager avec vous.

Une des choses qui me faisaient vraiment sentir en contrôle était d’appuyer « Command + TAB » à tout instant pour travailler sur 3 ou 4 tâches selon l’inspiration du moment. En fait mon cerveau et mon travail étaient plutôt disparates. J’ai dû arrêter cette mauvaise habitude pour travailler sur ma nouvelle entreprise PND Design. Pour résoudre la démence du multitâche, je me suis imposé quatre conditions clés, dans le but de développer mon habileté à focuser sur une seule tâche à la fois.

Quatre façons de se cesser sa dépendance au multitâche

1. Une application à la fois. De cette façon, je m’oblige à terminer la tâche essentielle dans ce logiciel. Pas de SMS, pas de modification en lien avec le blog, pas de « brainstorming » sur d’autres projets, pas de réseaux sociaux, rien! Cette simple habitude transforme entièrement ma façon de travailler. Essayez donc d’interrompre les personnes les plus influentes que vous puissiez trouver pour le plaisir… Vous risquez de vous faire virer de bord assez vite. C’est pour cette raison qu’ils ont des « Gate Keeper ». Une tâche à la fois… ma mère avait dont raison.

2. Définir une liste de tâches (to do list). Je débute normalement ma journée en prenant de 5 à 10 minutes pour l’organiser et définir les priorités. Certaines fois je le fais le jour précédant. Par contre, beaucoup de gens ont de la difficulté à suivre leur propre planification. Une des méthodes très efficaces que je connaisse est de faire une rencontre avec une personne qui s’engage à faire de même pour avoir à « rendre des comptes » sur ces tâches.

Ça semble un détail mineur, mais il peut faire une grande différence. La raison est qu’au lieu de seulement écrire les tâches sur papier, nous devons penser à une multitude de détails par rapport à ces tâches. Par exemple. « Dave, je veux écrire cet article sur ce genre de contenu, parce que j’ai eu cette inspiration en revenant du Demo Day de FounderFuel … Je pourrais prendre cette direction, cet angle … La « To Do List » ne change pas, mais nous savons plus clairement ce que chacune des étapes implique. La clarté nous permet de mieux évaluer le temps et les priorités. Le jour suivant, tout ce que nous aurons à faire est de regarder cette liste et de l’accomplir.

3. Changer d’environnement de travail. Celle-ci est de loin ma préférée. Changer d’endroit au moins une fois par jour est un changement qui a beaucoup augmenté ma productivité et mon attention en général. Je ne quitte jamais mon bureau sans avoir fait la deuxième étape ci-haut. Nous avons souvent entendu que nous devons créer un espace de travail confortable pour mieux travailler. Mais plus encore, ce que j’ai observé, c’est que nous devons en créer plusieurs. Parfois, le fait de prendre une pause de cinq minutes ou de boire quelque chose ne suffit pas pour reprendre mon attention et passer à la tâche suivante. Pas plus que d’éteindre son ordinateur pour cinq minutes et revenir à mon bureau. Je sens viscéralement le besoin de bouger d’un endroit à un autre. Je ne crois pas que ce soit un caprice. Souvent, je commence à travailler de chez moi durant la première moitié de la journée et par la suite, je me déplace dans un café/resto près de chez moi.

4. Limiter les notifications (aka les interruptions). Cette règle est la plus difficile à appliquer. Tout d’abord, pour les SMS je demande à mes proches de les éviter. Je préfère de loin communiquer par courriels. Les courriels fonctionnent de façon asynchronisme. C'est à dire non synchronisé. C'est-à-dire que je décide quand les consulter. Parfois, quand je reçois un SMS, je vais répondre par courriel pour faire respecter mon droit à la non-distraction.

Au niveau des courriels, je crois que c’est aussi intense à arrêter que l’héro. Je m’oblige à regarder mes courriels seulement le matin, l’après-midi et le soir. Trois fois par jour, pas cent fois.

Pour m’aider, je ne vois pas le nombre de nouveaux courriels reçus lorsque l’application Mail est réduite. Je n’ai pas de notifications sonores qui m’indiquent l’arrivée de nouveaux messages. Je crois sincèrement que c’est de la folie d’accepter d’être continuellement dérangé par tous les messages qui entrent dans nos boites à messages et nos chats.

Au niveau de mon téléphone intelligent, toutes mes boites courriel sont désactivées par défaut. J’ai seulement un courriel privé (par exemple: [email protected]) où je reçois la redirection de certains messages grâce à des règles prédéterminées. Mon employé sait que je recevrai son message en tout temps s’il écrit le mot clé “Urgent” dans l’objet du message. Ceci est possible grâce aux filtres inclus dans Gmail. C’est un outil extrêmement puissant pour minimiser les dérangements.

Et pour ceux qui gèrent tout seulement à partir de leur téléphone ? Je crois que vous creusé votre tombe de distraction xlarge. Je serais sincèrement heureux de savoir comment vous y arrivez :)

Écouter de la musique c'est bon ?

Au cas où tu te poses la question Lekt, écouter de la musique en travaillant n’est pas à proprement parler du multitâche. C’est ce qu’affirme le professeur Clifford Nass. « Dans le cas de la musique, c’est un peu différent. Nous avons une partie spéciale pour absorber la musique. Ainsi nous pouvons en écouter, tout en faisant autre chose. » Voici une bonne nouvelle.

Une piste pour arrêter le multitâche

En fait, sur papier ce n'est pas si compliquer. Si focuser est en fait éliminer les distractions d'atteindre son attention, on pourra cesser de multitâcher une fois pour toute. Protéger mon attention, mon focus à maintenant une extrême importance à mes yeux. Focuser sur une seule tâche à la fois a été un des effets les plus bénéfiques sur ma vie professionnelle et personnelle.

Cet article m'a été directement inspiré de Leo Widrich qui travaille chez Buffer. Voici l'article original


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Ma vie serait si productive si je pouvais multitâcher comme un pro. Quand je vois quelqu’un écrire un courriel, pendant qu’il est en train de faire une approbation par téléphone, tout en faisant un signe à la serveuse qu'il désire un réchaud de café, je me dit : « Wow ... lui yé en business ». Puis on se dit : « Moi aussi je veux assurer le show comme ça ».

Sauf que ... les études le démontrent. Quand on multitâche, on devient très mauvais dans tout ce qu'on fait.

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Annotations

  1. Selon Antidote: « Le verbe focuser est un anglicisme – Le mot focuser doit être remplacé par focaliser, axer, centrer, concentrer, insister ou porter son attention sur, car il constitue un anglicisme. »

  2. À mon avis, ces traductions ne sont pas exactes. Je préfère continuer à utiliser focuser. Pour cet article, je vais même me permettre de créer le verbe « multitâcher ».


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